Les états et empires du lotissement Grand Siècle : archéologie d'une utopie de Fanny Taillandier
Les états et empires du lotissement Grand Siècle : archéologie d'une utopie de Fanny Taillandier
PUF, 2016, collection "perspectives critiques".
Essai philosophique que j'ai lu comme un roman et pour lequel j'ai eu un véritable coup de cœur. Original !!
Je me suis plongée dans la réalisation du modèle du lotissement, dans les espoirs et l'idéalisation d'un mode de vie qui s'est effondré, cela m'a ouvert les yeux sur une époque ancienne et à la fois pas si éloignée de nous. La déchéance est à la hauteur de l'espoir initial dû à sa création. J'ai apprécié cette écriture mêlant réalisme, documentaire-récit, essai idéologique. Au dernier chapitre, j'ai chuté, je suis rentrée en contact avec une paroi de verre qui m'a fait passé dans un autre registre, une bascule de trop pour moi, une péripétie inutile qui n’apporte rien et même qui gêne. Au contraire, cela enlève de la puissance au texte.
Le lotissement a été le grand rêve urbanistique de la seconde moitié du XXe siècle. Le rêve d’une maison à soi, où reconstituer une vie qui rassemblerait tous les traits d’une Arcadie à la fois familiale et communautaire, fondée sur l’égalité et la propriété. Il n’en a rien été. Aujourd’hui, le lotissement pavillonnaire est devenu le repoussoir absolu – le lieu d’une vie où ne règneraient plus qu’ennui, vide et mauvais goût. En retraçant, par une multitude virtuose de moyens, l’histoire presque quotidienne d’un lotissement disparu, Fanny Taillandier dresse ainsi le portrait mi-grinçant, mi-ému d’une utopie et du douloureux réveil qui a suivi son effondrement, en même temps que de ce qui, dans cet effondrement même, continue de nous séduire. Car, à travers cette histoire, c’est encore notre quête naïve d’un habitat idéal qui continue de se lire – quête qui se déplace désormais ailleurs, dans d’autres rêves, appelant d’autres déceptions.