L'homme qui ne savait pas dire non de Serge Joncour

Publié le par Brouillard

L'homme qui ne savait pas dire non de Serge Joncour

Serge Joncour - L'homme qui ne savait pas dire non.  Serge Joncour - L'homme qui ne savait pas dire non.On n'imagine pas l'embarras de ne plus pouvoir prononcer ce simple mot : non. C'est pourtant ce qui arrive à Beaujour, employé modèle dans un institut de sondage. Grâce à un atelier d'écriture, il part à la recherche du mot perdu, quitte à remonter toute l'histoire. Avec la sensibilité qu'on lui connaît, Serge Joncour multiplie les scènes cocasses et compose un véritable roman des origines.

J'ai découvert l'auteur avec le titre L'amour sans le faire. J'ai apprécié l'écriture, la tendresse qu'il manifeste pour ses personnages affectés par les méandres de la vie. C'est pourquoi j'ai eu envie de lire dans la foulée un autre titre de lui. En consultant le catalogue de ma bibliothèque municipale, je suis tombée sur L'homme qui ne savait pas dire non.

coeur

Vous vous imaginez dans toutes les situations de votre vie quotidienne, incapables de formuler une réponse négative, de prononcer ces trois lettres "NON". Dans l'enfance, il existe un âge où le "non" est la réponse à presque toutes les questions. C'est un leitmotiv d'affirmation de soi et d'opposition à l'autre. Notre protagoniste recherche ce mot, cette faculté de chacun de formuler un refus, de dire : "je ne veux pas" pour ne pas se retrouver dans des situations inextricables, rocambolesques parfois et qui peuvent blesser davantage qu'un "non" ne le ferait.

A travers ce personnage, l'auteur mène une réflexion sur notre société. En effet, le personnage central travaille dans une entreprise de sondage. Son travail consiste à élaborer des questionnaires, mais aussi à les faire passer à un panel d'individus pour que le client sache ce que l'on pense de son produit ou que l'Etat et le gouvernement puissent faire des propositions de gouvernance qui ne seront pas conspuer. La recherche de légitimité et d'assise plus profonde du pouvoir sont au centre des débats, quitte parfois à manipuler les individus, à les diriger vers ce que l'entreprise ou le Pouvoir vise. Aussi l'écriture de Serge Joncour est admirable dans le sens où elle est assez habile pour faire passer ces réflexions en finesse derrière la vie et les difficultés du personnage. Elle investit un fort pourcentage de sympathie. C'est encore un individu en souffrance qui est donné à voir, à suivre. Cependant comme dans L'amour sans le faire, le personnage central, Beaujour cherche à se reconstruire. Même si le chemin n'est pas aisé, la tendresse, l'humour des situations et l'amour que Beaujour éprouve pour sa collègue sont autant de leviers vers la solution. Son introspection est induite dans le cadre d'un atelier d'écriture, une sorte d'ouvroir de mots. C'est un atelier de groupe où chaque individu se rend pour y retrouver ce qu'il a perdu sans savoir ce que c'est exactement parfois ou comment s'y prendre pour le retrouver. L'animateur insuffle une mission d'écriture toujours plus accrue à sesparticipants, ils doivent fouiller au plus profond d'eux pour y débusquer le récalcitrant.

La lecture de ces textes thérapeutiques est incluse dans le roman de manière à s'attacher davantage à Beaujour, à suivre les méandres de sa psychologie, à tenter d'apprivoiser ce mot qui échappe. Ce procédé pourrait sembler artificiel au lecteur que nous sommes, mais il se mêle très bien au reste du roman. Une fois passée la surprise de la découverte de ce premier texte, on s'interroge, cela nous bouscule un peu dans la linéarité du récit de cette quête.

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